Le soufisme de nos jours

Dr. Nurbakhsh

Au tout début le feu de l’amour
N`était qu’une faible flamme vacillante—
Cependant, de beaucoup vinrent s’ajouter
Et depuis, contribuèrent ainsi à son intensification.

Hajj Mulla Hadi Sabziwari

Considérant les confusions et les malentendus qui existent par rapport au Soufisme de nos jours, il semble nécessaire selon moi, d’apporter des clarifications et des précisions sur certains points fondamentaux tout au moins.Rappelons que le Soufisme d’aujourd’hui n’est certainement pas celui d’il y a plus de mille ans. Les différences sont énormes.
De surcroît, le Soufisme continue d’évoluer selon des développements en rapport direct avec les nouvelles conditions sociales qui elles aussi tendent vers le changement.
Permettez-moi de mentionner trois de ces types d’évolution :
Quiétude et Réclusion
Selon les pratiques Soufies la quiétude et la réclusion, soit la mise en retrait de l’individu, s’affairant le jour et la nuit venue se plongeant totalement en devoirs dévotionnels, de telles pratiques sont de nos jours, interdites.
Les Maîtres de la Voie, ont tous un emploi et une vie professionnelle active. D’aucun n’eut été un parasite social. Jadis, il était coutume que certains Maîtres soient forcés de s’isoler du monde, à cause d’un clergé dogmatique au comportement insidieux qui s’opposait ouvertement et sournoisement au soufisme. Pareils Maîtres se retiraient des courants de la vie sociale afin d’éviter les émeutes des masses endoctrinées par un clergé fanatique et hostile qui avait tendance à libeller les Soufis d’hérétiques et d’infidèles.
Aujourd’hui, cependant, se retirer et s’isoler de la société sont des comportements inacceptables. Il est recommandé d’avoir un emploi et de participer au développement socio-économique de la société dans laquelle l’on vit en gagnant sa vie tout en demeurant responsable du bien être de sa famille.
Mais plus que toute chose, il est nécessaire de servir autrui. Si un Soufi est vu assis à être désœuvré dans un coin, l’on peut sans hésitation en conclure que telle personne est soit un (e) dupé(e), ou alors c’est une personne sans sincérité aucune donc hypocrite.
Par conséquent, le Soufi d’aujourd’hui n’est ni un ermite ni un reclus, mais bel et bien un membre actif de la société.
Service à La Création
Un principe fondamental du Soufisme est le service à autrui et à la création; c’est à dire au monde qui nous entoure. Par conséquent, un véritable soufi, n’est jamais sans occupation. Non seulement le Soufi est activement employé à gagner sa vie, mais aussi il donne généreusement aux autres pour leur venir en aide et réjouir leurs cœurs. Si, dans le passé, ils étaient des quémandeurs, leur état servait à discipliner et démanteler l’ego. Et en fait, pareils Soufis redistribuaient tout leur avoir aux pauvres.
De nos jours, nul Soufi ne peut vivre à la charge d’autrui et être un fardeau social. Si un Soufi s’engage en devoirs dévotionnels extérieurement et pratique certains exercices spirituels, c’est purement dans le but de discipliner l’ego et dans un effort de résister aux tentations pour arriver ainsi à se purifier intérieurement.
Ces Soufis comprennent très bien, que Dieu n’a nul besoin de nos dévotions. Servir la création c’est servir Dieu. Servir autrui c’est recevoir les faveurs du Divin et Sa Grâce.
C’est pourquoi le Soufi prise la vie en tant que potentialité de pouvoir servir l’humanité, aider et soulager les cœurs, voyant en eux la manifestation du Divin.
L’intention de l’individu est fixée sur Dieu uniquement, car être un amoureux de Dieu signifie que lors de la mise en pratique l’exercice du service, l’on ne recherche rien d’autre que Son Amour.
L’Anéantissement en Dieu
Le Soufi sur la Voie n’a d’autre désir que de s’anéantir en Dieu.
La difficulté à atteindre ce but est rendue dans les vers suivants de ROUMI qui explique :

De tous les milliers d’initiés
Peut-être un Soufi ,
Il y a.
Les autres vivent de la Bonté du Maître.

La force et l’endurance ainsi que l’aptitude nécessaires pour réussir à atteindre le but final visé, n’est certainement pas à la portée de tout un chacun.
Cependant, si en se mettant au service des autres l’on demeure constant dans notre tentative de plaire à Dieu, pareille personne réussira par la Grâce de Dieu d’une façon ou d’une autre.
Pour conclure, le Soufisme est une école de dévotion vouée à Dieu et au service de l‘humanité sans trace aucune de prétention ou de moralisation.

Traduit du magazine SUFI n° 55, 2002.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *