La prière et le jeune

Dr. Javad Nurbakhsh

Un bédouin marchait dans le désert avec son chien. Il avait une outre d’eau à l’épaule et pleurait à chaudes larmes.

On lui demanda : «  Pourquoi pleures tu ? » Il dit : « Parce que mon chien à soif » Alors on lui demanda : « Pourquoi ne lui donnes tu pas de l’eau ? » Et il répondit : « Parce que j’ai besoin de  cette eau. »

Vous, les derviches, vous êtes prêts à entendre parler du soufisme mais, quand il s’agit de le mettre en pratique vous vous montrez réticents.

Vous aimez lire des ouvrages sur le soufisme et entendre parler à propos du soufisme mais quand il s’agit de le mettre en pratique vous êtes un peu contrariés.

Nous disons cela pour vous réveiller quelque peu tout en sachant que cela vous est difficile.

Un disciple de Jonayd préparait le narguilé de son maître depuis trente ans. Un jour, au bord du bassin alors qu’il préparait le narguilé, il pensa : « Cela fait trente ans que je sers ce maître et il n’adresse aucune prière à Dieu pour que mon cœur s’éveille. »

Quand il apporta le narguilé à Jonayd, celui-ci lui dit : « Si tu avais un cœur, il se serait déjà éveillé mais que puis je donc faire puisque tu n’en as pas. »

Ce soir je vous dirai quelques mots à propos de la prière et du jeune car la religion de l’amour en plus de la prière et du jeune habituels a une prière et un jeûne particulier qui relèvent de règles et usages spécifiques.

Je vais vous dire quelques unes de ces règles pour que vous preniez connaissance des principes de la voie spirituelle dont vous vous réclamez.

La prière des soufis ne comporte que deux prosternations. Pour accomplir ces deux prosternations le soufi fait son ablution avec l’eau de l’amour puis, se tourne vers la Kaaba : « De quelques coté que vous vous tourniez, la face de Dieu est là. » Et il dit quatre fois Allâh-o-Akbar ( Dieu est grand ).

Avec le premier Allâh-o-Akbar, le soufi abandonne ce monde et ceux qui y sont attachés.

Avec le deuxième Allâh-o-Akbar, il oublie le monde de l’au delà.

Avec le troisième Allâh-o-Akbar, il élimine de son cœur la pensée de tout autre que Dieu.

Avec le quatrième Allâh-o-Akbar, il s’oublie aussi lui même.

Puis il commence sa prière et avec sincérité il fait cette prière sur la dépouille de son nafs. A la fin de la prière, il rejoint Dieu.

De nos jours, l’ablution de cette prière prend des années au soufi. Cependant si certains y parviennent, ils resteront des années au niveau du premier Allâh-o-Akbar. Rares sont ceux qui arriveront au deuxième Allâh-o-Akbâr et parviendront à oublier les deux mondes.

Le jeûne des soufis n’est pas seulement réservé à un seul mois dans l’année. Les soufis jeûnent tous les jours de tout sauf de l’amour bonté de Dieu ( Haqq ). Et vous, vous n’avez pas pu jeûner un seul jour de cette noble façon !

Alors vous qui n’avez accompli ni la prière ni le jeûne des soufis, comment espérez vous qu’on vous offre les stations de Hallâj et de Bâyazid pour que vous soyez satisfaits ?

Rumi dit à ce propos :

Comme les petits enfants qui, avec les pans de leur vêtement jouent à monter à cheval,

tu chevauches ta tunique et espères t’engager dans le champ de bataille.

 

Traduit du magazine persan n°1

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