Le Monde (El Mundo)

Un homme du peuple de Neguà, sur la côte de Colombie, put monter au ciel.

Au retour, il raconte. Il dit avoir contemplé, de là-haut, la vie humaine. Et il dit alors que nous sommes une mer de petits feux.

Le monde est ainsi révéla-t-il. Une foule de gens, une mer de petits feux. Chaque personne brille de sa lumière propre parmi toutes les autres. Il n’y a pas deux feux semblables. Il y a des feux grands et des feux petits et des feux de toutes les couleurs. Il y a des gens de feux sereins, qui ne s’informent pas du vent, et des gens de feux fous, qui remplissent l’air d’étincelles. Quelques feux, des feux ignorants, n’éclairent ni ne brûlent, mais d’autres désirent la vie avec tant d’ardeur que l’on ne peut les regarder sans cligner des yeux, et qui s’en approche, prend feu.



Par Eduardo Galeano, poète uruguacho

Extrait du livre Amares, publié à Madrid, 1999


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